A l’occasion des « journées d’Architectures à vivre » organisées par le journal « A vivre », j’ai eu le privilège de découvrir une maison atypique conçue par les architectes Vladimir Doray et Fabrice Lagarde ( Wild Rabbits Architects ) en collaboration avec Caroline Dubois qui a suivi l’exécution du projet. Découverte d’un impressionnant chantier !
A Épinay-sur-Seine (93), situé à l’angle de la rue de Verdun et des Alliés, un bunker surgissant de nulle part semble titiller le voisinage. A première vue, le passant peut se demander s’il s’agit d’un vestige de la Grande Guerre ou bien d’un objet éphémère construit par un artiste décalé. Cependant, une fois les interrogations passées, place aux explications.
Le béton à l’honneur
Tous les architectes sont d’accord qu’un maître d’œuvre joue un grand rôle dans une réalisation. Et que dire quand c’est ce dernier qui propose de sortir des sentiers battus pour créer une architecture extraordinaire où les deux parties peuvent donner libre cours à leur imagination ?
Toujours est-il que la réalisation d’un tel projet n’est jamais facile à suivre. Les complications commencent déjà avec le permis de construire qui a retardé le rêve de quelques années. Un rêve devenu aujourd’hui réalité et qui rend probablement fiers même les personnes qui s’y sont opposées. Avoir dans sa commune un joyau architectural même s’il tranche avec le classicisme ambiant devrait être un avantage. Ici, c’est mon opinion personnelle qui prend le dessus et je vois en cette maison non pas un bunker isolé qui rappelle de mauvais souvenirs mais un hommage parfait au travail en béton tellement cher au cœur de Claude Parent. Ceux qui connaissent l’église Sainte-Bernadette du Banlay me donneront raison.
Parlons un peu du projet. Même si cette fois-ci les allemands n’y sont pour rien, l’apparence est malgré tout très trompeuse. Sauf qu’il s’agit d’un béton fraîchement coulé dont les quelques imperfections témoignent tout autant de sa fragilité. Nous sommes bien devant une œuvre atypique hermétique de l’extérieur mais qu’en est-il de l’intérieur ?
Le paquebot
Une fois la « barrière » franchie, nous sommes au cœur de l’édifice. C’est avec un plaisir chargé d’émotion que Vladimir Doray ainsi que le propriétaire des lieux nous livrent les différents moments vécus lors du chantier. De l’agacement à la joie en passant par la résignation, la patience et l’opiniâtreté, les récits s’enchaînent. Pendant ce temps, les regards des visiteurs balayent les pièces et scrutent les détails. L’une des rares ouvertures de la maison donne (via une très grande baie vitrée) sur un jardin anarchique qui avec sa végétation luxuriante barre toute vision au voisinage, tandis qu’une autre ouverture est à l’image de la passerelle du paquebot d’où les propriétaires peuvent contempler le paysage urbain lointain en faisant tranquillement la cuisine. Quant à la troisième ouverture elle se trouve au dernier niveau, elle donne sur une pente couverte de caillebotis se trouvant derrière la haute muraille du dernier étage.
L’idée du départ n’était pas de profiter de l’orientation ni d’accumuler des labels de durabilité mais d’avoir une maison qui réponde aux diverses exigences de ses propriétaires. De ce fait, le rêve continue jusqu’au bout pour rajouter au dernier étage une terrasse offrant une époustouflante vue dégagée qui permet de voir le Sacré Cœur, la tour Montparnasse, la tour Eiffel et les tours de La Défense.
Le bunker d’Épinay-sur-Seine est le résultat de la volonté ainsi que de la persévérance du maître d’œuvre doublé de la hardiesse de l’architecte qui l’a conçu. La réalisation a une très grande qualité, malgré sa différence, elle affiche une extraordinaire existence. La satisfaction existe aussi en architecture !
Les photos : ©Arsen Tanguy
Je n’aurais pas imaginé que ce lieu soit aussi spacieux et beau.
ET encore les images ne donnent pas toute la dimension intérieure. C’est vraiment un très beau projet.