« Soutenir », la manifestation à découvrir !

« Soutenir », la manifestation à découvrir !

« Soutenir », la manifestation à découvrir !

© Sipane Hoh

Applaudir l’idée car elle est aussi utile que primordiale, mais surtout observer, découvrir et puis comprendre l’importance d’un tel geste. A Paris, le Pavillon de l’Arsenal présente un remarquable parcours mené avec brio sur un sujet à la fois délicat et indispensable.

Le « care »

Sous la codirection de la philosophe Cynthia Fleury et du collectif d’architectes SCAU, la manifestation « Soutenir » expose « des lieux et des architectures qui nous tiennent et nous soutiennent, plutôt qu’ils nous détiennent ou nous contiennent ». Il s’agit, en effet, bien plus que d’une exposition mais d’une remise en question à partir d’un voyage dans l’intimité de l’architecture hospitalière et de l’acte de soigner à travers plusieurs études de cas, des lieux mais aussi des territoires présentés sous leurs aspects urbains, philosophiques et paysagers.

Pourquoi aujourd’hui, plus qu’hier nous nous interrogeons au sujet du « care » ? Car l’épidémie de Covid qui a affecté brusquement l’humanité et vidé les villes a su nous interroger. En effet, en Île-de-France, plus d’un million de personnes ont choisi de quitter la métropole pour trouver un semblant de protection ailleurs, dans les campagnes, dans d’autres villes beaucoup plus petites, certaines cités éloignées où il était plus facile de se sentir « soutenus ». Un phénomène non pas récent car il a déjà existé par le passé mais rare qui a su bouleverser, ne serait-ce qu’un petit moment, l’équilibre des villes. C’est ainsi que certains questionnements naissent et d’autres accaparent notre quotidien. Quid de l’accès aux lieux de soin et la place de la médecine dans la ville de demain ? Quelle prise en charge de toutes les pathologies ? Quelle réponse au vieillissement de la population et à la mortalité urbaine ? Toutes ces interrogations qui nous taraudent et qui participent à la transformation de nos territoires sont légitimes.  

Une manifestation plurielle

La manifestation du Pavillon de l’Arsenal est plurielle. D’une part une exposition riche en matières (photos, maquettes, vidéos) d’autre part un livre recherché mais aussi un cycle de tables rondes qui traitent le sujet avec adresse. Parlons un peu de l’exposition : A travers un parcours limpide organisé autour de sept thèmes où le visiteur se déplace avec aisance d’un espace à un autre, divers témoignages expliquent, développent et étayent plusieurs siècles de soin et des lieux du soin. Une scénographie épurée, à la fois simple et sensée met ainsi en avant plusieurs interprétations où « Il est question de distances, entre la santé et la maladie, et entre la ville et ses lieux de soin ; d’éléments, c’est-à-dire des territoires non-architecturaux qui sont soignants ou non soignants ; de formes, à savoir celles que prend l’hôpital et, plus généralement, l’institution du soin ; de frontières, celles traçant tant bien que mal les limites des gestes et des lieux du soin, du plus intime au plus public ; de nécropoles, pour parler du soin que nous portons aux morts ; hétérotropies, ces architectures alternatives dans lesquelles, et grâce auxquelles, s’inventent d’autres formes de soin ; d’inhabitables enfin, c’est-à-dire de ces territoires malades dans lesquels l’architecte doit réparer le monde. » 

Quelques pépites et coup de cœur

Au deuxième étage du Pavillon de l’Arsenal, le visiteur de l’exposition « Soutenir » peut découvrir néanmoins quelques pépites. Citons par exemple la photographie du « Restless Sphere » qui met en avant la performance des architectes de COOP Himmelb(l)au à Bâle. Une autre photographie retient l’attention, celle de Shusaku Arakawa et Madeline Gins, Sites of Reversible Destiny dont j’avais parlé à moult reprises. Ailleurs, le « Manifesto for Maintenance » de Mierle Laderman Ukles, une déclaration proposée pour l’exposition « Care » de 1969 de Philadelphie. Un coup de cœur pour l’assemblage des extraits de l’œuvre Virus d’Antoine Agata qui couvre, avec ses couleurs chatoyantes, un mur entier.

Après avoir traversé une période indécise et deux ans après le premier confinement qui a bouleversé nos habitudes, le Pavillon de l’Arsenal a dédié un étage entier au thème de la santé et des enjeux urbains qui en découlent. L’exposition « Soutenir » accompagnée de l’ouvrage éponyme et qui peint avec une grande dextérité l’histoire des relations entre soin, ville et architecture est à saluer !

© Sipane Hoh
© Sipane Hoh
© Sipane Hoh
© DR

L’exposition est à visiter jusqu’au 28 août 2022.