Silena, quand les Alpes rencontrent l’Asie

Silena, quand les Alpes rencontrent l’Asie

Silena, quand les Alpes rencontrent l’Asie

© Alex Filz

L’architecture qui traverse l’histoire de plusieurs générations a toujours eu une certaine importance. Comme celui de l’historique « Moarhof », aujourd’hui connu sous le nom de l’hôtel Silena. Un petit bijou situé dans la vallée de Tal, dans le Tyrol du sud, remanié avec la plus grande adresse par l’agence d’architecture noa*.

Le début des vacances

Les architectes de noa* nous racontent qu’en 2017, la famille propriétaire de l’hôtel Silena a décidé de faire un changement architectural saisissant sur la base d’une décision audacieuse et inhabituelle. La transformation de 2022 est la deuxième que la résidence a subi, et vient compléter un concept commencé il y a cinq ans, également porté par noa*. La structure s’est enrichie d’une nouvelle entrée, de six nouvelles suites et d’un salon mais aussi d’un espace de bien-être, concrétisant ainsi le concept originel.

C’est au cours d’un long voyage à travers l’Asie que les propriétaires se sont pris de passion pour les coutumes et rituels observés tout au long de leur parcours, et qu’ils ont choisi d’intégrer ce qui leur a plu comme éléments du design dans la conception de l’hôtel. Il était donc évident d’intégrer les éléments classiques et ambiances associés au monde asiatique à l’architecture existante. Tout le concept de l’intérieur s’inspire de cette imagerie, tant en termes de composition des matières et des couleurs. Cela commence déjà dans l’entrée nouvellement conçue, où les invités traversent un portail rond, en bois, ouvrant selon une technique asiatique qui capture la pureté de travail du bois traditionnel. La pièce est simplement construite de matériaux horizontaux et verticaux, emboîtés les uns dans les autres. Par ailleurs, les murs de l’entrée ont été peints en noir à l’aide d’une technique de truelle grossière avec une finition minérale, transformant ainsi l’entrée en une sorte de tunnel et intensifiant le passage qui rythme le début des vacances.

Un trait d’union avec l’Asie

Un accent particulier a été mis sur le moment de l’arrivée, en effet, les visiteurs sont accueillis dans un espace ouvert et l’œil est libre de serpenter le long de l’axe qui s’étend du nord de l’entrée vers le sud du jardin intérieur. Cette atmosphère relaxante invite les clients à prendre un moment pour se reposer et boire un verre. La fontaine en pierre, nouvellement conçue, le coin cheminée et les alcôves confortables atténuent la rigidité classique. L’intention est soulignée par le placement de la réception sur le côté. Les échos d’Asie sont subtils mais omniprésents et se révèlent sous la forme d’un bois sombre associé à la nuances de bleu et de gris, des bonsaïs de pins délicats en poterie céramique, des rochers verticaux de pierre locale et de discrètes lumières en forme de lanterne. Un mur entier est dédié au moulin tibétain à prières composé de cylindres en bois qui, d’une simple pression de la main, partent dans une rotation perpétuelle. Des lignes nettes créent une atmosphère harmonieuse et donnent un calme retentissant et de la profondeur. Comme une annexe à ce paysage se trouve le stube tyrolien classique – le cœur même du Moarhof d’origine – son histoire, son style rustique et son bois d’origine sont encore mis en valeur par sa proximité directe avec le nouveau bar proposant du thé minimaliste.

« Le stube et le salon de thé sont séparés l’un de l’autre par un simple encadrement de porte : ils semblent rendre visible la transition entre les origines et l’avenir de Silena. » Raconte Christian Rottensteiner, architecte en chef du projet.

Faire un avec la terre

Le chêne sert de matériau de référence et de fil rouge dans tout le bâtiment. La paysage de tourbière environnant qui a donné son nom à la ferme d’origine (Moar signifie « marais » en dialecte local) imprègne tout le bâtiment et se retrouve dans ses couleurs et matériaux. Tous les meubles sur mesure ont été fabriqués à partir de chêne, et c’est le chêne qui est utilisé pour les six nouveaux étages et les suites de l’hôtel. Par ailleurs, toutes les suites sont liées entre elles par un design et un concept de chambre fédérateur. Un puissant sentiment de connexion au sol est présent dans chaque salle, avec des espaces individuels délimités par les podiums sur lesquels on s’assoit, comme le lit, le coin méditation et la table à thé, qui peut être abaissée vers le sol pour être hors de la vue. Cet arrangement s’inspire de la tradition japonaise de créer de petits espaces bien délimités. Le thème de la chambre asiatique se poursuit vers les terrasses conçues comme des chambres extérieures. Chaque suite dispose d’un petit jardin extérieur équipé d’une baignoire, des petits parterres de fleurs et des rideaux, évoquant des éléments symboliques de la culture d’origine. « Tout est lié à ce qui touche au sol : le lit, la plate-forme de la cérémonie du thé, le coin méditation – il y a toujours un podium qui déplace le centre de gravité vers le bas lorsque vous vous tenez à l’intérieur de la pièce. Alors tu restes fermement enracinée au sol. » précise Christian Rottensteiner.

Changer les frontières

Les 30 à 55 m² sont des suites de mètres se caractérisent par un jeu séduisant de lumière et d’ombre, de visibilité et d’intimité. Les cloisons des chambre en bois à motifs géométriques contribuent largement à cela, perpétuant le jeu animé de la lumière qui pénètre par les panneaux en aluminium à motifs de la façade. La séparation entre la zone de couchage et la salle de bain est intrigante et même parfois illusoire, elle est inspirée des murs japonais en papier de riz, en effet, noa* a créé une cloison composée en partie de panneaux de verre opaques, en partie semi-transparents et à certains endroits de panneaux ouverts, pour maintenir une relation entre les deux espaces et évoquent le flux dans l’ambiance. Deux lavabos en céramique en forme de tulipe se reflètent dans le comptoir en verre de la vanité et le papier peint sous-jacent. La façade du bâtiment assure l’intimité, transformant les terrasses en un espace semi-privé. Les clients ressentent une sensation agréable d’isolement et en même temps une vue magique sur le paysage environnant.

Un fabuleux bien-être

Dans le nouvel espace spa et de bien-être au dernier étage, noa* a conçu une zone de retraite et de bien-être réservé aux adultes et inspiré des sources japonaises Onsen. Ici, il y a un espace détente, des douches pour les rituels de purification traditionnels et une piscine en plein air maintenue à un niveau constant de 40 degrés. La conception de la piscine, avec des marches en béton noir apparentes rappelle le volcan, crée une mise en scène texturée saisissante. L’eau qui coule à l’infini le bord et les ondulations sur la surface de béton rugueuse crée des reflets imprévus et fait partie de la cérémonie méditative omniprésente à Silena. Jusqu’où peut-on aller sans briser les vieilles traditions tout en introduisant simultanément de nouvelles impulsions à une histoire qui se développe? Avec ce projet, noa* a répondu à cette question de manière peu conventionnelle. Les formes ont été reprises, la matérialité a continué, le nouveau juxtaposé à l’existant. Dans un lieu traditionnellement alpin, où le mystique et l’envoûtant s’invitent, l’architecture raconte l’histoire de deux cultures lointaines qui se croisent et se complètent.

© Alex Filz
© Alex Filz
© Alex Filz
© Alex Filz
© Alex Filz
© Alex Filz

Le site de noa* : ici.

Les photos : © Alex Filz