Bristol : d’une architecture ‘So British’ à une architecture ‘So Standard’

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Bristol : d’une architecture ‘So British’ à une architecture ‘So Standard’

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Qui ne connaît l’histoire de Bristol, ville anglaise multi-ethnique à l’architecture en mosaïque, cité étudiante où le ‘Street Art’ côtoie de majestueux bâtiments historiques ? Bristol, visage effronté d’une autre Angleterre, restera-t-elle encore longtemps cette ville atypique que chantent les chroniqueurs ? Rien n’est moins sûr…

Royaume-Uni | Bristol | Street-Art |

Sur la rivière Avon, celle-là même du poète, dans le sud-ouest du Royaume-Uni, Bristol est une ville portuaire qui, depuis le XIIe siècle, au fil des événements, s’est forgée une singularité que des villes anglaises plus prospères et de taille plus conséquente lui envient.

Son architecture, un brassage d’époques et de styles qui lui ont laissé un héritage à la fois inspiré et intemporel, est à l’image de son histoire et déambuler dans ses rues revient à une délicieuse promenade dans le temps. Un musée à ciel ouvert.

Le visiteur flâne ainsi entre les reliques d’un passé glorieux, vestiges autant d’architectures Géorgienne et Victorienne, préludes à la beauté et à la grâce, que d’architectures industrielle et post-industrielle. «So British».

Cela écrit, en matière de construction, Bristol n’a jamais eu d’état d’âme pour raser des quartiers entiers au nom de grandes opérations. Ainsi, des dizaines de maisons à pignons ont disparu à jamais de la carte de la ville au nom du modernisme.

L’industrie n’y est pas pour rien. C’est le site historique de la société Cameron – connue mondialement pour la fabrication de grandes montgolfières – et des éléments du Concorde y furent construits.

Les bombardements de la seconde guerre mondiale ont rasé une bonne partie du centre ville. De grands ensembles et quelques bâtiments brutalistes témoignent encore de l’urbanisation d’après-guerre. D’aucuns en tirent argument pour décrier la qualité architecturale de la ville.

Plus récemment, sous l’ère Thatcher, la misère sociale a conduit, en 1986, la population de Bristol à de grandes émeutes. Depuis, les autorités ont entrepris plusieurs plans d’aménagement et la ville a encore changé.

Plus récemment encore, dans les années 90, la cité portuaire a engagé des chantiers de rénovation ainsi que de grands travaux de revitalisation de son centre-ville.

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Hier, en 2006, deux grands ensembles qui dataient d’après-guerre ont été complètement démolis pour laisser place, selon ses laudateurs, à une architecture plus accueillante et joyeuse.

A cette occasion, les quais d’Avonmouth ont été déplacés de 11km et un port flottant a été créé.

Depuis, d’autres projets à vocation artistique et sociale ont été développés.

Bristol n’en demeure pas moins dans le subconscient anglais comme la ville «undergroud» par excellence.

C’est en effet à Bristol, dans ses quartiers les plus populaires, que sons et lumières se sont mêlés pour y créer le Street Art. C’est ici qu’est né Banksy, ce personnage mystique dont les graffitis sont internationalement connus et reconnus.

Les murs de certains quartiers portent encore pour longtemps la griffe de ce rebelle dont la ville s’emploie à restaurer les oeuvres. Du jamais vu, encore moins en Angleterre. Coïncidence ou reconnaissance ?

Peut-être Bristol est-elle tout simplement une ville hybride fière de sa culture cosmopolite. Un port.

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Certes Bristol, bien que ses trésors architecturaux soient loin d’être inintéressants, ne sera jamais candidate au patrimoine mondial de l’Unesco. Malgré pourtant la visite de la reine Victoria, à qui plusieurs monuments et avenues sont consacrés et à laquelle la ville doit ses édifices majestueux et squares fleuris.

En 2007, le centre commercial Broadmead a été réaménagé tandis que les façades de plusieurs gratte-ciel (dont la West Tower et la Tollgate House) étaient réhabilitées. Conçues en panneaux de verre transparent, elles ressemblent désormais aux autres tours de par le monde, symboles de la puissance économique internationale.

Aujourd’hui, le conseil municipal a voté une loi selon laquelle la construction de nouveaux gratte-ciel était accordée sous réserve qu’ils soient de bonne qualité. Une tour de 40 étages, censée agir comme une nouvelle entrée de la ville, a même été approuvée.

Le dernier de cette série d’ouvrages nouveaux est le ‘Circus Cabot’, un énorme centre commercial qui, selon les autorités locales, sauvera la réputation du quartier où il est implanté et, surtout, sera un symbole du renouveau de la ville.

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Un édifice moderne à l’architecture pimpante où sont représentées les dernières marques convoitées de la planète shopping. A croire que les centres commerciaux sont devenus les nouvelles bouées de sauvetage des villes, à Bristol comme à Paris, à Londres, à Dubaï ou à Shanghai…

La nouvelle architecture de Bristol, cette ville si fière, aurait-elle soudain des airs de déjà-vu ? La rebelle d’hier, sur la côte anglaise, finira-t-elle par s’abandonner à l’air du temps pour se réveiller ‘So Standard’ ?

Ou parviendra-t-elle, à défaut des compliments de l’académie, à préserver le caractère ‘So Unusual’ qui a fait son renom ?

Sipane Hoh

Cet article est paru en première publication dans le courrier de l’architecte le 23 novembre 2011.

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