Tour Eiffel des mers, du pétrole et des idées

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Tour Eiffel des mers, du pétrole et des idées

Concrete architectural associates

Immortelle, l’architecture ? A l’heure où de nombreuses villes choisissent de réhabiliter leurs friches sinon décident de densifier les quelques terrains vacants qui leur restent, d’autres imaginent de réutiliser d’improbables structures, des plates-formes pétrolières notamment. Appétence pour l’inusuel ou conviction ?

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Les plates-formes pétrolières sont une typologie propre au paysage maritime du XXe siècle. Construites en nombre, ces géants des mers n’ont plus raison d’être après plusieurs décennies d’exploitation. Leur démantèlement est non seulement coûteux mais il implique aussi de graves conséquences sur les milieux ambiants. Face à leur démontage obligatoire*, quelques architectes se sont penchés sur le bien-fondé d’une éventuelle réutilisation.

Des propositions fictives

Le concours d’architecture international Evolo témoigne de l’intérêt que suscitent ces imposantes structures. Les architectes malais Ku Yee Kee et Hor Sue-Wern ont, à ce sujet, présenté une vision, lauréate du premier prix du jury. Le projet propose de réhabiliter ces tours Eiffel des mers pour une utilisation profitable à l’homme.

Revitaliser ces plates-formes, les transformer en îlot d’habitations doté d’une capacité de résistance au changement climatique serait une solution non négligeable. Suivant ces études, la partie émergée devrait être consacrée à divers logements alors que la partie immergée serait dévolue à un centre d’études aquatiques abritant biologistes et scientifiques.

Une zone intermédiaire pourrait être consacrée à diverses activités. Les panneaux photovoltaïques positionnés sur le toit fourniraient l’énergie nécessaire. En somme, une île délaissée, rapidement colonisée pour une durée indéterminée.

Ailleurs, mais tout aussi fictif – et en réaction au nombre important de plateformes construites dans les années 70 dans le golfe du Mexique – l’agence américaine Morris Architects, basée à Houston, propose de spectaculaires transformations soit en gigantesque attraction touristique, soit en hôtel de luxe.

L’alimentation en énergie d’un tel projet serait rendue possible par une éolienne centrale et des panneaux photovoltaïques qui viendraient soutenir un système complètement autonome. La luxueuse résidence hôtelière utiliserait même les vagues via des générateurs. L’architecture, quant à elle, serait matérialisée par de nombreux containers empilés et acheminés jusqu’à la plate-forme.

Ces petites îles artificielles seraient capables d’amarrer des bateaux de croisière et d’accueillir des hommes d’affaires souhaitant donner un nouveau cadre à leurs réunions. Une proposition osée qui vise avant tout à changer le regard des hommes vis-à-vis de ces dinosaures métalliques qui incarnent à merveille l’industrie des énergies fossiles.

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De la fiction à la réalité

En parallèle à ces utopies et à ces projets rêvés, qui trouveront peut-être un jour preneur, il existe aujourd’hui une solution réaliste contribuant à la requalification de tout un quartier.

Voilà la palpitante histoire d’une plate-forme à Amsterdam : construite en mer du Nord en 1964 dans les eaux internationales, cette imposante structure était destinée à accueillir une ‘radio pirate’. Pouvant émettre sans le contrôle des gouvernements voisins, elle est restée telle quelle jusqu’à l’adoption d’une nouvelle loi révisant les limites territoriales. Les Pays-Bas ont ainsi hérité de la plate-forme, devenue en 1975 l’île de REM. Utilisée à des fins scientifiques pour la compagnie nationale de l’eau, d’aucuns pouvaient y mesurer la température de la mer, la salinité de l’eau. D’autres fonctions sont venues s’ajouter les vingt années qui ont suivi.

Depuis, le promoteur Nick van Loon, en collaboration avec la société ‘De Principaal’, a acheté la structure et l’a faite parvenir jusqu’à Amsterdam. C’est dans les eaux de la rivière Ij – et à proximité immédiate d’un quartier en pleine expansion – que cette immense plate-forme a trouvé sa place.

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Construite entièrement en acier, elle présente une très grande ressemblance avec les plates-formes pétrolières. Sa reconversion s’avère être un minutieux travail de démantèlement et de ré-assemblage, une opération qui a nécessité un formidable travail couplé à une abondante imagination.

L’ensemble comprend un restaurant de deux étages perché sur un niveau de bureaux. Au sommet, à 25 mètres de hauteur, une terrasse avec vue panoramique est ouverte au public. Une passerelle en acier a été rajoutée pour pouvoir rejoindre le bâtiment et des sorties de secours ont été aménagées dans la structure. Rouge et blanche, cette ile artificielle est devenue le symbole d’une réincarnation.

Alors que certains ne jurent qu’au nom de l’architecture éphémère, les Néerlandais apportent la preuve que, même caduque, une structure peut être pérenne.

Sipane Hoh

* Le démantèlement total des plates-formes pétrolières est une obligation internationale depuis la Convention de Genève de 1958 relative aux droits de la haute mer.

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Les photos: © Ewout Huibers for Concrete Architectural Associates

N.B. Cet article est paru en première publication dans le courrier de l’architecte le 11 avril 2012.

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