Entre Ville-nouvelle et Nouvelle ville, le cœur d’Hérouville oscille

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Entre Ville-nouvelle et Nouvelle ville, le cœur d’Hérouville oscille

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Ville nouvelle et laboratoire d’architecture contemporaine, inscrite dans le développement centralisé de l’agglomération de Caen, Hérouville-Saint-Clair est l’exemple parfait d’une identité originale allant au-delà d’un nom de quartier. La ville, quarante ans plus tard, n’a toujours ni assouvi toute son ambition ni achevé son extension. Singularité pérenne ?

Hérouville-Saint-Clair | Aménagement du territoire

Au début des années soixante était un bourg du Calvados, village germé sur des ruines romaines, quelques habitations d’époque autour d’une ancienne église. Particularité remarquable cependant, sa faible distance de Caen, une ville marquée par l’explosion de son taux de croissance dans les années 1950-1960, après guerre.

Aux Etats-Unis, des villes nouvelles ont vu le jour dès les années 30. Plus tard, d’autres cités de par le monde, conséquence notable de la Charte d’Athènes*, sont nées à leur suite. En France, ce n’est qu’à partir de 1965, avec De Gaulle, que la création et le développement de villes nouvelles comme des structures autonomes a été décidée.

Ce fut le cas d’Hérouville, devenue Hérouville-Saint-Clair.

C’est François Geindre, son maire pendant trente ans (de 1971 à 2001) ; un homme passionné d’architecture, qui a souhaité saisir l’opportunité de transformer sa cité en une ville dynamique, innovante et ambitieuse. Pour y parvenir, il fit appel aux grands patronymes de l’architecture contemporaine : Christian de Portzamparc, Jean Nouvel, en passant par Roland Castro et Massimiliano Fuksas, chaque architecte y possède un ouvrage, voire plusieurs, portant sa griffe. Hérouville-Saint-Clair est ainsi devenue un condensé d’architectures contemporaines et un exemple incontournable d’extension urbaine.

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Tout visiteur et touriste qui découvre la ville est impressionné par la quantité (pas forcément la qualité) des constructions modernes qui y figurent. ‘Les Belles Portes’, ‘Le Grand Parc’ ou ‘La Haute Folie’, autant de noms de quartiers qui interrogent les curieux dont les pas conduisent à la place centrale, ‘La Citadelle Douce’. Réplique moderne de la place moyenâgeuse, la mairie se positionne en première loge comme un château d’autrefois.

Une agora vide qui aujourd’hui n’attire de foule que celle qui la traverse. Les importantes institutions culturelles de la ville se sont installées là, du théâtre au cinéma jusqu’à la bibliothèque. Le coeur de la ville-nouvelle ne bas pas très fort pourtant.

Allons faire le tour de la ville, découvrons une église contemporaine aux couleurs acidulées, la cité universitaire signée Massimiliano Fuksas, les deux projets clés signés Jean Nouvel, où la couleur de l’un fait face à la façade en béton brut couverte de végétation de l’autre. Plus loin, quand la ville tend à fuir, se trouve l’arrêt de tram signé par les architectes de l’agence Tetrarc, une innovation où la technologie et l’architecture ne font qu’un. Pour finir, citons l’emblème même de la ville, le château d’eau aux couleurs et formes futuristes, signal d’une ville qui va au bout de ses aspirations.

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Certes, Hérouville ne se résume pas aux exploits architecturaux de ces trente années cumulées. Aujourd’hui – et ceci depuis presque dix ans -, la ville restructure, réhabilite, reconfigure et rénove dans le but d’un conservatisme apparent.

Par souci de densification cependant, les constructions neuves se multiplient, les squares s’organisent et les centres commerciaux s’agrandissent. En 2009, un projet audacieux promet d’ériger une tour Place d’Europe, une écriture architecturale sans précédent pour une ville de 22.000 habitants. La ville nouvelle de François Geindre, capable de telles aspirations ?

Hérouville, laboratoire d’architecture, amasse aujourd’hui les nouveaux projets, des logements HQE et autres BBC et autre label ‘Haute performance énergétique’. Peut-être une manière pour la ville de poursuivre cette lignée architecturale.

Apparemment, les nouveaux quartiers, presque tous «à acheter ou à investir», ressemblent à s’y méprendre à ce qui se fait ailleurs et semblent loin de l’esprit qui animait cette architecture caractéristique des débuts de la construction de la ville.

Ainsi, ‘la ville nouvelle’ cède peu à peu la place à une ambition plus actuelle et plus standard, celle de ‘la nouvelle ville’ à l’architecture convenue.

Hérouville l’ambitieuse, la ville qui n’a jamais terminé son extension, finira-t-elle un jour par se dissoudre dans l’uniformité circa 2011 ?

Qui sait ?

Sipane Hoh

* La Charte d’Athènes a constitué l’aboutissement du IVe Congrès international d’architecture moderne (CIAM), tenu à Athènes en 1933 sous l’égide de Le Corbusier. Le thème en était ‘la ville fonctionnelle’. Urbanistes et architectes y ont débattu d’une extension rationnelle des quartiers modernes.

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Les photos : © Sipane Hoh

N.B. Cet article est paru en première publication dans le courrier de l’architecte le 22 juin 2011.