Frugale mais sensible, la réalisation de Farid Azib à Saint-Lô

Frugale mais sensible, la réalisation de Farid Azib à Saint-Lô

© Luc Boegly

Le nouveau technopôle de Saint-Lô vient d’être terminé. Il s’agit d’un bâtiment remarquable, identifiable de loin, à l’allure fière, à la fois sobre et frugal qui constitue le point de départ de la nouvelle zone d’activité dédiée aux diverses entreprises innovantes du territoire. Un projet qui porte la signature habile de Farid Azib (RANDJA).

Une forme simple, un programme complexe

A Saint-Lô, une forme simple accueille un programme complexe dont des espaces de co-working, d’autres de réceptions et de démonstration ainsi qu’un auditorium, le tout dans un écrin minéral qui allie monumentalité et élégance. L’architecte Farid Azib et son agence ont été retenu en 2015 pour mener à bien le projet. « j’en étais très heureux. Connaissant mal la région et la ville de Saint-Lô, je sentais pourtant une attirance pour ce territoire à la géographie particulière, cette grande presqu’île réelle et ancienne, et j’avais toujours été interpellé par la dénomination « Manche », le nom donné au département. Cet attrait, tout autant que la programmation, a fortement motivé ma candidature. » Déclare l’architecte.

Mais ce territoire peu connu de certains, a su au fil du temps rebondir tout en se projetant vers l’avenir. En effet, la ville de Saint-Lô possède une histoire chaotique, ayant été bombardée à la fin de la Seconde Guerre mondiale, elle porte les stigmates du passé, mais elle est aussi capable d’envisager l’avenir, un avenir où l’architecture joue l’un des rôles les plus importants. Et c’est sous la houlette de Farid Azib que la renaissance architecturale de ce morceau de ville se profile. L’architecte puise ainsi dans le passé de Saint-Lô pour écrire, avec les mêmes matériaux, un chapitre nouveau où texture et matérialité se croisent dans la plus simple des formes et composent le futur Technopôle Agglo 21. Minéralité et robustesse sont donc les caractéristiques de la nouvelle réalisation qui allie admirablement et avec la plus grande finesse, l’agrégat, la roche et le béton.

« Ce sera l’agrégat, le béton, le même utilisé au lendemain de la guerre, cette roche pulvérisée en gravats, que Saint-Lô a ramassée, triée, assemblée pour en faire à nouveau des murs solides et protecteurs. Le béton se confond avec l’histoire récente de la ville, ce matériau ayant beaucoup servi pour la reconstruction. Cette histoire avec le béton coïncide avec l’établissement d’excellents maçons venus d’Italie pour reconstruire la ville meurtrie. Ils vont créer des entreprises de gros œuvre exemplaires spécialisées dans le béton, qui œuvrent encore aujourd’hui ; la société Zanello qui a merveilleusement exécuté cet ouvrage, est l’une d’elles. » Raconte l’architecte.

Une conception sobre et lumineuse

A Saint-Lô, l’architecte n’a pas souhaité d’engendrer un volume pimpant aux vues magnifiques mais toute son attention a été orientée vers une conception sobre qui englobe les fonctions à l’intérieur des murs épais tout en dynamisant les interactions entre les usagers. Ainsi, les vues sur le paysage ne sont pas spécialement recherchées, à l’exception de l’amphithéâtre de 280 places, qui, exposé à la départementale, présente à la vue des automobilistes, la fonction du bâtiment. Un geste inattendu qui offre au regard des passants, un édifice différent des autres entités commerciales présentes aux alentours. L’intention de l’architecte était donc la générosité des espaces intérieurs mis à disposition des utilisateurs des lieux.

Néanmoins malgré l’aspect hermétique du projet, l’ensemble, manié avec tact par Farid Azib, dévoile plusieurs adorables surprises. En effet, si l’on regarde de près, l’équipement interagit avec son environnement. Notons par exemple l’espace « escalier-gradin » qui constitue un hémicycle de plein air en prolongement de l’amphithéâtre intérieur programmé. De même, l’agencement se fait par juxtaposition afin d’éviter les couloirs, l’architecte a conçu des espaces généreux où la lumière naturelle est toujours présente. Ainsi, le projet, qui semble opaque depuis la façade située au sud, sur les parkings, s’avère être baigné de lumière grâce aux larges baies vitrées donnant sur les patios intérieurs.

Outre l’exemplarité de la conception structurelle et la technicité de sa mise en œuvre inédite, le nouveau technopôle de Saint-Lô, à l’allure aussi monumentale que frugale, dévoile une indéniable sensibilité qui fait sa spécificité.  

© Luc Boegly
© Luc Boegly
© Luc Boegly
© Luc Boegly
© Luc Boegly

Le site de Farid Azib (RANDJA) : ici. (A noter que l’architecte Dhouha Hamdi est le chef de projet.)

Les photos : © Luc Boegly